La vie intérieure ici-bas sera toujours un combat

 CONTRE NOUS-MÊME

« Te semble-t-il que tu trouves obstacle à ta vie intérieure dans les œuvres extérieures ? Ce ne sont pas ces œuvres qui te sont un obstacle, c’est le désordre que tu y mets en n’y recherchant pas uniquement Dieu dans ton amour, dans ton intention, dans ton cœur. Tu es dissipé, encombré d’images et Dieu n’habite pas pleinement dans ton intérieur. En vérité, voilà l’obstacle : ce ne sont pas les œuvres, ni autre chose, c’est toi-même.

(Jean Tauler, sermon 17)

Ah! Que nous sommes lents à croire ce que dit Jean Tauler !

Nous accusons les autres, le manque de temps, les services qu’on nous demande sans cesse… Mais le véritable ennemi est en nous, introduit dans la place comme un cheval de Troie : le péché originel a laissé des traces en nous par le dérèglement de nos passions. Ce « foyer de péché » est l’allié du deuxième adversaire de notre vie intérieure : le diable.

 

CONTRE LE DÉMON

Il veut absolument nous faire lâcher la vie intérieure, la prière.

Souvenons-nous du petit démon qui tire le moine hors de l’oratoire à l’heure de l’oraison dans les Dialogues de saint Grégoire (Dialogues II, 4). Le diable voit bien la grande force que la prière donne à une âme. Il pressent également la fécondité immense de la vie intérieure sur les âmes, sur l’Église. Il fait donc tout pour nous en détourner en faisant diversion. Sa tactique n’a pas échappé à sainte Thérèse de l’Enflant-Jésus:

« Nous n’avons que les courts instants de cette vie pour aimer Jésus; le diable le sait bien, aussi tâche-t-il de la consumer en travaux inutiles… » (Lettre 92, le 30 mai 1889)

 

CONTRE LE MONDE

Notre vie intérieure risque de se laisser engloutir sous le flot de l’information, d’être étouffée par le bruit des communications et l’attrait de la consommation. Il faut encore ajouter à ces menaces les tares de la société actuelle: le déracinement, le manque de repères, le péché érigé en « normalité », voire en dogme incontestable… Écoutons la voix prophétique de Bernanos, si lucide sur les dérives du monde moderne:

« On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l’on n’admet pas d’abord qu’elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure. »

La vie intérieure est un combat dans la durée.
Elle n’est pas un havre de paix, une tranquillité acquise une fois pour toutes, mais une lutte continuelle. Les moines, les soldats et les nomades, tous les hommes du désert se retrouvent dans ces mots de Saint-Exupéry:

« Vous durerez, l’ayant conquise, dans l’oasis, si l’oasis pour vous n’est point l’abri où l’on s’enferme et où l’on oublie, mais une victoire permanente sur le désert. » (Citadelle, chap. VII)

Ainsi, l’âme qui s’élance dans la vie intérieure va devoir lutter, affronter des obstacles, connaître des épreuves et progresser sans cesse jusqu’à remporter enfin la palme de la victoire.

Extrait de «Découvrir la Vie Intérieure», par un Moine bénédictin, (Ed. Sainte Madeleine, 2012)